Si une image vaut mille mots, il n’est pas étonnant qu’il faille prendre soin de la perception que les autres ont de nous. Mais qu’arrive-t-il quand il est impossible d’avoir son mot à dire sur cette image? Quand d’autres décident comment nous représenter? Nous nous sommes penchés sur la représentation des personnes ayant une limitation fonctionnelle dans les médias.
Les représentations médiatiques des personnes avec une limitation fonctionnelle
La Chaire de recherche du Canada sur les médias, les handicaps et les (auto)représentations a vu le jour à la Faculté de communication de l’Université du Québec à Montréal (UQÀM) le 29 juillet 2020. Son titulaire, Mouloud Boukala, anthropologue et professeur titulaire à l’École des médias de l’UQÀM, avait un projet ambitieux, celui d’établir une base de données sur les représentations des personnes avec une limitation fonctionnelle dans les médias. La tâche en était une de taille! Pour y arriver, Mouloud Boukala et son équipe ont recensé, rassemblé et analysé toutes les productions culturelles québécoises qui ont vu le jour entre 1980 et 2020.
La banque de données se révèle être un outil citoyen déployé à l’usage de tous. C’est donc un outil qui vise à opérer un changement social. Vous pouvez cliquer ici pour accéder à la base de données de la Chaire de recherche du Canada sur les médias, les handicaps et les (auto)représentations. Le site se veut accessible avec la possibilité d’activer une lecture vocale pour les personnes qui ont une déficience visuelle, de lire les textes en français simplifié et offre même une capsule vidéo qui présente la Chaire en langue des signes québécoise.
Le premier constat est encourageant. Depuis 1980, le nombre de productions médiatiques québécoises qui représentent des personnes avec une limitation fonctionnelle, c’est-à-dire qui comportent des personnages qui ont un handicap, est en croissance. Il semblerait même que l’augmentation, pendant toutes ces années, ait dépassé le 200 pour cent!
3 personnages distincts
Même avec plus de représentativité dans les médias, les personnes avec une limitation fonctionnelle demeurent bien souvent mal représentées. En d’autres mots, ce qu’on nous présente dans les médias s’éloigne souvent de la réalité. Les personnes avec une limitation fonctionnelle sont souvent représentées selon 3 stéréotypes différents. La victime, le héros et le méchant.
La victime est probablement le stéréotype le plus souvent utilisé. Il est très simple : le personnage en situation de handicap n’est ni plus ni moins qu’une victime qui sert à cultiver l’apitoiement du public et à attirer sa sympathie. Pour nommer un exemple bien connu de tous : Quasimodo de Notre-Dame de Paris de Victor Hugo.
Le héros, contrairement à la victime, semble être un stéréotype préférable. Il est courageux et surmonte son handicap. Ou pour certains cas, les personnages possèdent des superpouvoirs grâce à leur handicap, tel que Daredevil et sa cécité. Mais le stéréotype du héros est problématique à quelques égards. Il doit d’abord surmonter son handicap pour être normal, sous-entendant que s’il ne le fait pas, il est anormal. De plus, si le héros surmonte son handicap, il n’est pas représentatif des nombreuses personnes qui doivent vivre avec le leur.
Finalement, le méchant est le personnage qui peut être aigri par les difficultés rencontrées à cause de sa limitation fonctionnelle ou qui commet des crimes à cause d’un trouble mental. Bien loin de la réalité, ce stéréotype dépeint un caractère obtus qui, comme la victime et le héros, prive le personnage d’un développement plus complexe et réaliste tout en véhiculant une image trompeuse et nuisible des personnes en situation de handicap.
Des exemples plus près de la réalité
Les représentations médiatiques, pour être exactes ou à tout le moins proches de la réalité, nécessitent beaucoup d’attention et de sensibilité. Un bon exemple peut être Walter Jr. dans la télésérie Breaking Bad, car les préoccupations du personnage et les obstacles qu’il doit surmonter n’occupent pas seulement le domaine de sa limitation fonctionnelle. Le personnage évolue au cours de l’histoire tout en évitant les pièges des stéréotypes. Il est aussi nuancé et complexe qu’une personne réelle.
Plus près de nous, au Québec, les bandes dessinées présentent des options intéressantes de personnages en situation de handicap. La bande dessinée Famille Sourdoux de Daniel Deschênes et François Gauvin expose une famille dont tous les membres sont sourds. Destinée aux enfants, la bande dessinée permet d’en apprendre sur le quotidien d’une personne sourde tout en évitant les stéréotypes abordés plus haut.
Finalement, dernier exemple, la bande dessinée Il pleut des pachydermes de Maryse Pigeon et Raymond Parent décrit la vie quotidienne de Marco, un enfant qui a le syndrome d’Asperger. En le suivant dans sa vie quotidienne, le lecteur apprend ce qu’est la vie du point de Marco, les difficultés que rencontre une personne avec le syndrome d’Asperger sans pour autant verser dans la victimisation ou l’aigreur.
Bibliographie :
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