Crise du logement et déficience intellectuelle : stress et discrimination

C’est bien connu, le Québec vit présentement une crise du logement. Quelques jours après le 1er juillet 2024, près de 1700 ménages n’avaient toujours pas trouvé de logement et risquaient de se retrouver sans domicile fixe. À la mi-septembre, le nombre de ménages en situation précaire était toujours semblable.

C’est une situation extrêmement stressante pour n’importe qui, mais pour les personnes ayant une limitation fonctionnelle, les risques sont encore plus grands.

Portrait de la situation

L’accessibilité au logement

Le logement est considéré comme le besoin numéro 1, comme un déterminant primordial au bien-être. Il est reconnu que les conditions de logement d’une personne ont un impact majeur sur sa santé physique et mentale. Un logement insalubre, trop cher, non sécuritaire ou incertain a de forts risques de causer des problèmes de santé chez son locataire.

Puis, récemment, les logements sont de plus en plus rares et leurs prix ont explosé, à cause, entre autres, de la pandémie et ses effets sur la construction et la rénovation. Cela a exacerbé les difficultés à se trouver un logement pour la classe moyenne et empiré encore plus la situation des personnes à faible revenu, et ce, partout au Québec.

Et c’est encore plus vrai pour les personnes ayant une déficience intellectuelle.  

Le logement et les personnes ayant une déficience intellectuelle

Quand on prend en considération que près du tiers des personnes en situation de handicap gagnent moins de 15 000$ par année et que 75% des personnes ayant une déficience intellectuelle vivent en situation de pauvreté, on comprend pourquoi les effets de la crise du logement sont exacerbés pour celles-ci.

Les personnes qui ont une déficience intellectuelle ont donc souvent moins de ressources pour trouver un logement. De plus, les propriétaires leur donnent plus rarement une chance, jugeant qu’elles présentent un risque d’être de mauvaises locataires.

Plus une personne a de limitations fonctionnelles, plus c’est difficile pour elle de travailler, de gagner sa vie, d’avoir une vie sociale épanouie et, bien entendu, de trouver un logement, ce qui accroît le risque de vivre l’exclusion sociale et l’itinérance.

Déficience intellectuelle et exclusion

La majorité des personnes ayant une déficience intellectuelle souhaitent vivre de façon autonome, à savoir seules ou avec des personnes de leur choix. Or, seulement 6% d’entre elles y arrivent, dû aux difficultés auxquelles elles doivent souvent faire face : pauvreté, discrimination et exclusion sociale.

Bien entendu, il est illégal de refuser de louer un logement à une personne parce qu’elle est en situation de handicap. Mais dans le marché locatif actuel, les propriétaires ont le gros bout du bâton et les personnes ayant une déficience intellectuelle se voient souvent refusées comme locataires. Ou elles sont victimes de mesures déguisées qui visent à les faire quitter un appartement, parce qu’elles ne sont pas des « locataires parfaits. »

C’est le cas d’un locataire de Montréal qui héberge deux personnes ayant une déficience intellectuelle : son propriétaire lui impose une augmentation de 3 000$ par mois, grâce à la clause F*. Le propriétaire dit que ce n’est pas une expulsion déguisée et que son locataire n’a qu’à payer pour rester. Mais selon toute vraisemblance, le propriétaire souhaite se débarrasser des locataires et, surtout, de ceux en situation de handicap.

Et ce n’est qu’un exemple. De telles situations de discrimination et d’exclusion, qui s’ajoutent à la rareté des logements abordables, amènent régulièrement des personnes ayant une déficience intellectuelle à tolérer des logements insalubres ou non sécuritaires, faute de pouvoir trouver mieux.

Ainsi, selon la Commission de la santé mentale du Canada, en 2013, plus de 500 000 personnes ayant un problème de santé mentale étaient logées de façon inadéquate et plus d’un quart d’entre elles étaient en situation d’itinérance.

*La clause F est une disposition qui permet aux propriétaires d’immobilier neuf de moins de 5 ans d’augmenter le loyer de leurs appartements sans limite.

Des solutions possibles?

L’indépendance, l’emplacement, le confort, la sécurité, l’abordabilité et l’intimité sont des caractéristiques qui devraient être accessibles à tous quand on parle de logement.

Il y a un besoin criant de logements sociaux réservés aux personnes en situation de handicap. Et d’un meilleur plan de lutte à la pauvreté, d’accès à l’emploi et de lutte contre la discrimination pour ces personnes.

Bien entendu, la création de plus de logements abordables pourrait aider à réduire la crise du logement pour tout le monde.

Bref, les personnes ayant une limitation fonctionnelle méritent d’être incluses et de vivre une vie épanouie, ce qui passe par leur pleine participation dans la société.

Pour cela, elles doivent avoir accès d’abord et avant tout à un logement adapté à leurs besoins et abordable, mais également avoir accès aux services, pouvoir travailler, prendre part à des activités de loisir et faire du sport.

Sources :

Association Canadienne pour la santé mentale – LE LOGEMENT : UN DÉTERMINANT MAJEUR DE LA SANTÉ MENTALE